Laissez-vous envoûter par les arômes et les couleurs uniques de ce havre de paix situé au cœur du Vieux-Montréal.
Son aménagement propose aux visiteurs un retour au XVIIIe siècle et l’occasion de se rappeler la beauté et l’utilité des plantes.
Le Jardin du Gouverneur est un endroit merveilleux où il fait bon se promener. Vous pourrez le visiter, prendre le temps de vous détendre et en apprendre davantage sur les jardins en Nouvelle-France. Son accès est gratuit en tout temps. De plus, une panoplie d'activités s'offre à vous lors de la saison estivale.
En attendant de venir nous rendre visite au coeur du Vieux-Montréal, nous vous invitons à découvrir le Jardin du Gouverneur en vous promenant à travers les pages de ce site Internet!
Plan du Jardin
Claude de Ramezay arrive à Montréal en 1705, à titre de nouveau gouverneur de la ville. Il engage le maçon architecte Pierre Couturier pour construire sa résidence sur le petit coteau de la rue Notre-Dame. Le domaine Ramezay s’étend alors sur 4 200 m2 et comprend un verger, un potager, mais aussi un jardin d’agrément où sont données, sans doute, de belles réceptions, car la demeure est au cœur de la vie sociale de la ville. A cette époque, les jardins sont nombreux à Montréal : on en compte 186 en 1731.
Au cours du développement de la ville, le domaine des Ramezay est morcelé par de nouvelles rues et de nouvelles constructions. Le Jardin du Gouverneur tel qu’il se présente aujourd’hui, recréé à l’été 2000, ne s’étend donc que sur un espace réduit à 750m2. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une reconstitution à l’identique mais d’un témoignage du style et du contenu des jardins de la noblesse montréalaise du XVIIIe siècle.
La plupart des plants utilisés aujourd’hui sont des hybrides des espèces cultivées en Nouvelle-France. Toutefois, les espèces présentées dans le jardin d’aujourd’hui sont très proches des plants qu’on faisait pousser dans le véritable Jardin du Gouverneur de l’époque. Le jardin est conçu d’une façon formelle (style à la française) et est divisé en trois sections de même grandeur : un potager, un verger et un jardin d’agrément. Le pourtour du jardin, le long des murs, est composé d’herbes aromatiques et médicinales distribuées de façon informelle. Une fontaine à tête de bouc orne le jardin d’aujourd’hui et rappelle que la fontaine ou le puits étaient des éléments centraux dans les jardins d’autrefois car ils permettaient de s’approvisionner aisément en eau.
Nous souhaitons remercier Investing in Nature:
Un partenariat canadien pour les plantes et leurs commanditaires pour leur support au développement de ce site web.
Pour les Autochtones, la notion de jardin comme on l’entend en Europe est inconnue. L’Européen ne trouve guère d’intérêt dans l’état naturel d’un paysage et cherche à transformer cet espace à sa façon, généralement selon un tracé linéaire et rectiligne. Pour l’Autochtone, pas question de modifier l’ordre sacré du monde par des clôtures : l’espace ne lui appartient pas et la nature est un jardin infini, unique et divin. Sa conception animiste du monde lui permet de composer avec son milieu et son environnement naturel qu’il exploite selon des méthodes douces.
Au Québec, il y a deux principaux groupes autochtones : les Algonquiens, nomades, vivant de la chasse et de la cueillette et les Iroquoïens, plus sédentaires, qui tirent de leurs champs une grande partie de leur subsistance. Les produits cultivés par ces derniers servent à l’alimentation, à l’extraction de pigments, à la fabrication de vêtements, à la médecine et aux cérémonials. Les Autochtones avaient développé de nombreuses techniques de culture, notamment la sélection et la fertilisation. Qu’ils soient nomades ou sédentaires, la cueillette est très importante pour leur survie (alimentation et médecine).
Les Autochtones ont transmis aux Européens leurs connaissances des plantes indigènes et, entre autres, comment faire du sirop et du sucre à partir de la sève de l’érable à sucre. Ils leur ont également fait connaître les vertus de bon nombre de ces plantes comme le ginseng, la salsepareille, le capillaire (variété de fougère) et aussi le tabac. L’introduction des plantes autochtones a transformé la cuisine occidentale. Les Autochtones du continent américain, nord et sud, nous ont apporté : tomates, pommes de terre, topinambours, haricots verts, pâtissons, poivrons, citrouilles, maïs, tournesols et riz sauvage. En fait, à leur arrivée les premiers colons français ont utilisé plusieurs des techniques et des produits alimentaires des Autochtones pour assurer leur survie, mais cette influence a décru par la suite, comme le montre l’exemple de la marginalisation rapide de la farine de maïs. Cependant, certains produits nord-américains ont continué à être cultivés en grande quantité, telle la citrouille qui avait particulièrement attiré l’attention des premiers immigrants et voyageurs.
Pehr Kalm (1716-1779), élève de Linné et célèbre botaniste suédois, fit un périple au Canada en 1749 et nota ses observations sur les jardins qu’il y vit. À propos des Autochtones, il note :
Les Sauvages ont encore un autre met qu’ils mangent en voyage, aussi bien qu’à la maison. Quand les citrouilles sont mûres, ils les découpent, écorce et chair ensemble, en d’assez longues tranches au soleil pour les faire sécher, ou encore dans leur pièce de séjour ou près du feu, après les avoir entrelacées de diverses manières. Une fois sèches, elles peuvent se conserver durant un très long temps, qui dépasse une année; lorsqu’on veut les manger, on met les tranches à cuire, seules ou accompagnées d’autre chose, et ce doit être un assez bon met, très sucré. Je crois cela d’autant plus volontiers que j’ai mangé quelques morceaux apprêtés de la sorte, qu’ils avaient assez bon goût sucré et qu’on aurait fort bien pu les manger secs. Les voyageurs utilisent assez souvent cette nourriture durant leurs randonnées chez les sauvages. Ils leurs achètent des tranches de citrouilles préparées de la sorte et s’en nourrissent.
Au XVIIIe siècle, le capillaire canadien, dont la cueillette était surtout faite par les Autochtones, était envoyé en Europe où on l’utilisait comme plante médicinale. En 1749, dans sa Description de plusieurs plantes du Canada, le médecin Gaultier observe qu’on ramasse beaucoup de capillaire.
On a soin de la faire sécher a l’ombre, on l’envoie en France où il se vend bien et où il est plus estimé qu’en Canada même.
– Médecin Gaultier
L'aménagement des jardins de la Nouvelle-France, à différent degrés : l'héritage du Moyen Âge, les réalisations de la Renaissance et l'intérêt croissant pour le jardin formel. Les jardins du Moyen Âge se caractérisent par l’importance de l’espace consacré au potager, la présence d’enclos, l’utilisation de bordures, le recours à des formes simples et à des allées régulières.
Quant aux jardins de la Renaissance, précurseurs du jardin classique français, ils sont conçus en lien avec le bâtiment qu’ils entourent, les formes s’y complexifient, les interventions humaines sont plus marquées et l’eau est davantage utilisée.
Le jardin perd alors de son usage personnel, et devient un vaste espace conçu pour être regardé.
Le grand art du jardin est ce par quoi une civilisation cherche, non point à copier la nature mais à se servir des éléments qu'elle lui fournit pour exprimer sa conception la plus haute du bonheur. –Benoist-Méchin, 1975
Le grand art du jardin est ce par quoi une civilisation cherche, non point à copier la nature mais à se servir des éléments qu'elle lui fournit pour exprimer sa conception la plus haute du bonheur.
–Benoist-Méchin, 1975
Enfin, le jardin formel français, né au XVIIe siècle et dont l’archétype est Versailles, reprend tous ces éléments du passé et devient en plus une série de lieux de mise en scène, un indicateur de la richesse et du rôle social. Ce type de jardin, dit «à la française», se veut une victoire de l’esprit sur la matière, une image de l’ordre et de la raison. Ses éléments de base sont la symétrie, l’ouverture de l’espace avec des horizons à l’infini, les bassins, les parterres en broderies et l’intégration de l’habitation dans cet ensemble.
Si le Jardin du Gouverneur à l’arrière du bâtiment évoque un jardin de l’époque de la Nouvelle-France, en revanche l’espace qui donne sur la rue Notre-Dame, devant le Musée, est aménagé tel qu’il l’était à l’ouverture du Musée au XIXe siècle. Il s’agit donc là d’un jardin dans le style «paysager» ou encore «à l’anglaise».
Le jardin dit «paysager» est né en Angleterre au XVIIIe siècle, en réaction au jardin «à la française» très policé. Ce nouveau style, dit «picturesque», a pour sources principales la peinture du paysage romain et l’amour des Anglais pour la nature. Ses promoteurs raillent l’artificialité du jardin «à la française» et recommandent comme guide la nature elle-même : il s’agit de composer des paysages naturels, en créant des parcs aux allées sinueuses avec des lacs et de vastes pelouses ponctuées de bosquets.
Article de Marie–José FORTIER, Ph. D., Historienne des jardins
Des documents récemment découverts aux Archives nationales d’outre-mer, en France, apportent des précisions sur l’état de la propriété de Ramezay un peu après sa mort. Ils permettent également de donner une forme aux jardins et de confirmer leur existence.
La disposition de la propriété offre un modèle d’aménagement à plusieurs zones tel qu’il apparaît dans les plans de ville de la Nouvelle-France dès 1670. Ce modèle se trouve surtout en milieu urbain quoiqu’il existe aussi des exemples de segmentation des espaces extérieurs dans les propriétés en banlieue.
La composition des espaces extérieurs en plusieurs zones à usage différencié apparaît comme un ajustement aux pratiques métropolitaines reproduites dans un contexte aux ressources limitées, dans le cas de ce membre de l’administration coloniale, gouverneur de Montréal.
Compte tenu des fonctions et des aspirations politiques de son propriétaire, ce jardin nous apparaît avoir joué un double rôle, à la fois espace privé et institutionnel. Dans sa première dimension, le jardin est composé de parties utilitaires et d’agrément alors que pour répondre à la seconde, il doit offrir un espace social, voire de représentation.
Les plans de Montréal et les plans spécifiques illustrant la propriété du gouverneur général, Philippe de Rigaud de Vaudreuil, et du gouverneur de Montréal, sont liés par des circonstances semblables. Claude de Ramezay (1659-1724), un temps gouverneur de la ville des Trois-Rivières, puis de Montréal de 1704-1724, laisse à sa mort une belle maison avec jardin et verger, donnant sur la rue Notre-Dame, mais aussi beaucoup de dettes à sa veuve.
Compte tenu de la situation, celle-ci propose l’achat d’une partie ou de la totalité de sa propriété au représentant du gouvernement en vue de son utilisation comme résidence pour l’intendant lors de ses séjours dans la région. La transaction sera éventuellement conclue et la maison occupée durant plusieurs années par l’intendant Hocquart, au gré de ses passages dans la ville. En octobre 1727, Claude-Thomas Dupuy, écrivant au ministre de la Marine, mentionne l’utilisation des plans de la ville, pour mieux faire connaître outre-mer la situation des deux résidences, et souligne le parallèle des deux démarches :
[...] j’ay eü soin de faire marquer sur le plan général d’une maniere distincte les emplacemens de ces deux maisons tant de celle de feu M. le marquis de vaudreuil que de celle de M de Ramezay pour que vous ayés le tout sous les yeux et que vous y metiés vous même l’estimation .
Auparavant, il avait précisé : Comme il n’y a point eü de commission du Roy au sujet de la maison de madame de Ramezay je n’en ay point fait faire de proces verbaux d’estimation en forme, mais j’ay chargé le S. Raimbault d’y emploier les memes experts, ala suitte de l’operation qu’ils ont faite de la maison de feu M. Le marquis de Vaudreuil, de sorte que pouvans penser avoir prêté le serment pour l’un et pour l’autre ils fussent plus attentifs à ne dire que la verite.
Dans cette même communication, Dupuy précise : « J’ay fait faire par M dugué le plan tant de la maison que du verger avec la disposition sur ce verger de la destination qu’en fait madame de Ramezay. Je joins les plans à cette lettre . » Quatre documents récemment découverts permettent dorénavant de situer avec précision le jardin de Claude de Ramezay et de comprendre le morcellement progressif de la propriété après la mort du gouverneur.
Tout d’abord, deux mémoires de la main de l’intendant Dupuy contiennent une description et une évaluation des lieux suivies de propositions en vue de leur utilisation comme domaine royal . Ces documents ne seraient cependant pas complets sans les plans auxquels ils réfèrent, en l’occurrence deux plans représentant pour l’un, la maison et la disposition des trois étages, et pour l’autre, l’ensemble de la propriété incluant la disposition du potager et du verger, découverts au cours de notre recherche . Le « Plan de la maison de Mad. de Ramezay » (ill. 1) et le « Plan de la Maison, Jardin et verger de Madame de Ramezay » (ill. 2) sont directement reliés aux mémoires de Dupuy; la correspondance sur plusieurs points a été établie et elle permet de confirmer cette hypothèse.
Dans l’examen de la représentation des jardins de Ramezay, nous questionnerons les formes et l’évolution du jardin dans la cartographie de la ville de Montréal entre 1717 et 1734; par la suite, l’examen des plans spécifiques permettra de compléter la description des lieux.
Dès 1717, la disposition de la maison et des jardins de Ramezay, représentés sur le plan de la ville, correspond de près à leur allure dans le plan particulier de 1727. La cour avant est circonscrite par un mur de pierre qui se termine d’un côté, sur le mur ouest de la maison, et de l’autre, à l’écurie établie le long de la rue Notre-Dame. Le verger fait suite à l’écurie et longe aussi la rue Notre-Dame; le jardin de plusieurs carrés se trouve à l’arrière de la demeure et se prolonge en entonnoir jusqu’à la rue Saint-Paul. En 1725, la situation est pratiquement inchangée. En 1731, la composition des espaces extérieurs est conservée mais la superficie de la propriété est réduite et ne possède plus d’accès direct à la rue Saint-Paul. En 1734 , le verger a disparu et seul subsiste le jardin arrière.
Le plan portant spécifiquement sur la propriété de Ramezay a l’avantage de nous renseigner sur l’organisation interne et sur la relation des parties entre elles. Le « Plan de la maison, jardin et verger de Madame de Ramezay » (ill. 2) est un bel exemple de la disposition des espaces extérieurs et des dépendances, semblable à ce qui figure, mais dans une version moins élaborée, dans les traités de jardinage de l’époque, notamment chez Dezallier d’Argenville. Sa simplicité le rapproche des jardins du domaine de Talcy , juxtaposition de carrés offrant fonctionnalité et ornementation.
Voyons de plus près la composition de l’espace extérieur. Une porte, aménagée dans le mur qui isole la maison de la rue, débouche au centre de l’avant cour, face à la résidence; de part et d’autre de cette cour, deux portes aménagées dans les murs perpendiculaires donnent accès à deux basses-cours distinctes comportant pour l’une, la glacière, et pour l’autre, l’écurie. La disposition des pièces de la maison est conçue en lien avec les aménagements extérieurs. Au rez-de-chaussée et à l’étage, une série d’ouvertures dans le mur arrière donnent sur le « jardin potager » alors qu’un escalier au rez-de-chaussée permet d’y accéder directement. Bien que Dugué désigne cet espace comme potager, l’attention portée à la représentation du jardin, sa composition formelle en quatre grands carrés et la rangée d’arbres qui complète l’aménagement donnent à penser qu’il remplissait une fonction à la fois utilitaire et d’agrément.
Dans le plan de 1727, le verger occupe un espace en L qui s’étend au-delà du potager et qui diffère de la représentation sur le plan de Montréal de 1725; son état correspond toutefois à la description qu’en fait Dupuy, dans le document annexe, et met en évidence sa valeur marchande, compte tenu de ses dimensions importantes :
Le verger qui contient scavoir la majeure partie a costé et joignant le terrain limité pour la Maison dix neuf toises trois pieds et demy de front sur le niveau de la rüe notre Dame et 18 toises deux pieds sur le niveau de la rüe St Paul et cinquante et une toises trois pieds de l’une desdites rues à l’autre, et lautre partie dix sept toises sur le niveau de ladite rue notre Dame sur quatorze toises de proffendeur, peut se diviser par emplacement dont douze sur la majeure partie en formant une rüe au milieu de vingt quatre pieds de large et deux dans l’autre partie sur la rüe notre Dame ce qui produisoit à madame de Ramezay, 14 à 15 000 livres en les donnant à constitution de rente aux preneurs suivant lavis des personnes qui en ont fait la visite .
En réalité, le plan spécifique est conforme aux représentations sur les plans de 1717 et 1725; Dugué a simplement inclus dans la superficie du verger la pointe du jardin qui se terminait à la rue Saint-Paul, ce qui permettait de vendre une bande de terrain où il serait possible de subdiviser l’espace et autoriser l’aménagement d’une nouvelle rue. Le plan du jardin et verger sert à illustrer la faisabilité d’une proposition d’affaire et non à mettre en valeur les aménagements extérieurs. L’auteur du plan n’avait donc pas intérêt à insister sur la composition et la valeur ornementale de ces espaces. C’est notamment l’envergure de l’espace consacré en jardin, et plus précisément le verger, qui accroît l’attrait de la propriété compte tenu de sa valeur foncière. À titre comparatif, Dupuy évalue la maison et le jardin, sans le verger, à 28 245 livres .
L’importance du jardin et du verger de Ramezay à sa résidence de Montréal a dû occasionner l’embauche d’un jardinier, situation cependant non documentée. Par contre, un contrat intervenu entre Ramezay et Gervais Chesnon, jardinier embauché pour un an, en 1693 , pour s’occuper du jardin du gouverneur résidant alors à Trois-Rivières, apporte un élément de réponse. On constate une continuité chez Ramezay quant à l’espace occupé par un jardin dans ses deux lieux de résidence.
Ce plan nouvellement retrouvé confirme, dans un premier temps, la présence de jardins attenant à la résidence de Claude de Ramezay. Il permet d’obtenir une image précise de l’organisation de la propriété.
Chez Ramezay, comme chez Vaudreuil, la disposition des espaces extérieurs reprend le modèle déjà apparu à Québec au siècle précédent et dont témoigne Villeneuve dans son plan de 1685.
La maison de Ramezay correspond à la demeure de petite noblesse campagnarde –entre autres, par la prédominance des espaces vivriers pouvant offrir des zones d’agrément–, un modèle français qui pouvait aussi se retrouver dans les agglomérations. Cette découverte a aussi le mérite de mettre un terme aux spéculations imprécises sur la forme réelle du jardin du gouverneur Claude de Ramezay.
Archives nastionales de France, Centre des archives d’outre-mer, dossier Claude de Ramezay, E344bis, feuillet 7, non paginé; quant au « plan général » dont il est question, il s’agit sans doute de celui réalisé par Dugué en 1726 : « Plan de la ville et des fortifications de Montréal relatif au mémoire ci-dessus », 19 août 1726, Archives nationales de France, Centre des archives d’outre-mer, Aix-en-Provence, 477/5pfb et 478/5pfB. Ibid., feuillets 1 et 2.
Ibid., feuillet 6. Au Château Ramezay, on savait que des plans de la propriété avaient été confectionnés au cours du Régime français, au moment du décès du gouverneur, mais ceux-ci n’avaient jamais été retracés. Nous les avons retrouvés en consultant la liste complète des plans de la collection Moreau de Saint-Méry, au CAOM, où ils avaient été classés dans la section « Guyane ».
Archives nationales de France, Centre des archives d’outre-mer, Aix-en-Provence, collection de plans de l’Atlas Moreau de Saint-Méry, Guyane, col. F3 289, plans 14 et 15, 1727.
Gaspard-Joseph CHAUSSEGROS de LÉRY, « Plan de la ville de Montréal dans la nouvelle France », 300 toises, 15 (ou 16) octobre 1734, Archives nationales de France, Centre des archives d’outre-mer, Aix-en-Provence, 487pf.5B.
J. WEILL, « Les jardins de Talcy, Loir-et-Cher » Monumental, Paris, Éditions du Patrimoine/MONUM, 2001, p. 48-49.
CAOM, dossier Claude de Ramezay, E 344bis, « Au sujet de l’emplacement et du verger de madame de Ramezay », p. 1.
Ibid., p. 3.
Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Montréal, Greffe Louis Chambalon, Québec, 30 octobre 1693.
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, en Nouvelle-France, les jardins sont essentiellement utilitaires. Plantes potagères, fines herbes, petits fruits et arbres fruitiers constituent la majorité des végétaux cultivés à cette époque. Ce qui n’empêche pas bien sûr, un dessin géométrique des plantations.
Cette formalité française est clairement reproduite dans le Jardin du Gouverneur au Château Ramezay. Ainsi, un plan réalisé en 1795 par le notaire Louis Guy, dit le «Plan parcellaire», montre comment les jardins des communautés religieuses (Sulpiciens, Jésuites et Récollets) et le jardin de Ramezay sont devenus plus sophistiqués et se présentent vraiment selon un plan formel, propre aux jardins à la française.
Dans l’ensemble, c’est cependant la vocation nourricière des jardins qui prédomine en Nouvelle-France. En effet, la culture des céréales et du jardin potager est essentielle à la survie de chacun, mais aussi à celle de la collectivité. Si on ne possède pas de terre, on s’engage pour travailler sur une ferme comme celle de la Congrégation ou celle d’un seigneur, ou on peut également la louer. Les semences des plants cultivés par les nouveaux arrivants sont souvent importées de France, mais les plants originaires d’Amérique du Nord sont également utilisés, sauf la pomme de terre qui ne sera cultivée qu’à la moitié du XIXe siècle car les «Canadiens »la trouvent fade et sans intérêt. Il faut noter qu’en Nouvelle-France les cultivateurs et jardiniers produisent généralement eux-mêmes leurs semences. Le commerce des graines se développera vers la moitié du XVIIIe siècle.
Dès la fin du XVIIe siècle (c'est-à-dire après les premières décennies difficiles pour les pionniers) et jusqu’à la fin du Régime français, la grande majorité de la population de la Nouvelle-France est bien nourrie et avec diversité. L’alimentation repose avant tout sur le pain, la viande, le poisson, les légumineuses et les légumes.
C’est en particulier grâce à leur jardin que les habitants de la Nouvelle-France peuvent varier leur alimentation et y ajouter des saveurs, même en hiver grâce à différents procédés de conservation. En Nouvelle-France, le plat principal est souvent composé d’un plat complet de viandes et de légumes, comme pot-au-feu, fricassée ou ragoût. Ceux qui en ont les moyens font précéder ce plat d’une soupe légère aux légumes. Les salades sont très appréciées, en saison, et les repas se terminent souvent, en saison et dans les occasions spéciales, par des desserts de fruits frais ou de laitages additionnés de sucre.
(Informations sur l’alimentation tirées du livre de Martin Fournier, Jardins et potagers en Nouvelle-France – Joie de vivre et patrimoine culinaire, Septentrion, 2004, Québec).
Un jardin ne s’établit pas n’importe où : il faut un terrain plat (sans quoi les terres seraient ravinées à la moindre pluie), parfaitement ensoleillé, loin de l’ombre et des racines des arbres, proche de points d’eau pour éviter les corvées de transport d’arrosoir et de brouette. Une terre moyenne est toujours recommandable : ni trop acide, ni excessivement calcaire.
Au XVIIIe siècle, la majorité des jardins montréalais sont clos par des murs généralement en bois, parfois en pierre. Cette façon de faire remonte au Moyen-Âge, alors que les jardins devaient être protégés des fléaux, du vandalisme, des voleurs et des bêtes sauvages. Elle est restée courante pendant plusieurs siècles en France et s’est transmise en Nouvelle-France. Chaque jardin bénéficiait ainsi d’un microclimat qui accélérait la reprise de la végétation au printemps et favorisait la culture des arbres en espalier, une technique qui s’épanouit dès la Renaissance.
Pour un jardin de la noblesse, l’impératif esthétique est aussi important que la productivité. Aussi les sections des différents jardins sont généralement bordées avec régularité. Dans le jardin d’aujourd’hui, les bordures sont de ciboulette, de buis et d’hysope. De plus, les jardins français du XVIIIe siècle étaient toujours divisés en carrés, rectangles et triangles bordés par des sentiers et des allées.
La conception du potager obéit à un ensemble de règles logiques et précises. Ce sont les principes agricoles de base qui en déterminent la disposition; par exemple, on fait toujours des rangs d’une seule espèce pour en faciliter l’entretien et les traitements. Ces rangs sont souvent orientés est-ouest pour mieux profiter du soleil et ils sont bien nets et espacés pour que chaque plante puisse s’épanouir. Les plates-bandes ne sont pas trop larges pour qu’on puisse les atteindre facilement à la main, ou alors on dispose de petits sentiers d’accès faits de roches plates. Les allées principales sont en revanche assez larges pour y circuler avec des brouettes ou charrettes quand il fallait amener statue, tonnelle, cadran solaire, etc.
Les cultures sont pour la plupart fugitives : il faut les changer régulièrement et l’alternance permet un désherbage plus efficace et limite le risque de maladies. Les cultures vivaces telles que les asperges, la rhubarbe, l’oseille et les herbes aromatiques sont plantées en permanence, sinon on plante des annuelles (tomates par exemple).Il faut également échelonner certains semis tels les haricots et les petits pois afin d’éviter les corvées d’écossage et les excédents. Pour des raisons d’usure des richesses des sols et de propagation des maladies, il est sage de ne pas planter à la suite des légumes identiques ou apparentés sur une même parcelle. On retrouve ici l’importance de la diversité, avec les idées de succession des espèces, de compagnonnage et d’interchangeage.
Tirer parti des caractéristiques des différentes plantes Les céleris et les choux sont des plantes gourmandes, très épuisantes, alors que les légumineuses (pois, haricots, fèves) enrichissent le sol en azote. Les melons et les concombres ont toujours été cultivés à l’écart pour ne pas étouffer les cultures moins vigoureuses. Les légumes rapides (laitues, radis) sont plantés au milieu des cultures lentes (choux, carottes).
À l’époque de la Nouvelle-France, on connaît la technique du compostage et on utilise des engrais naturels. Ces engrais sont des fumiers qui peuvent provenir d’animaux très divers (porcs, bœufs, chevaux, poules, dindons, pigeons, etc.), ainsi que des hommes (contenu des latrines).
Les instruments nécessaires pour l’entretien du potager étaient peu nombreux à l’époque de la Nouvelle-France. Pour le travail de la terre étaient utilisées la fourche, la pelle et la bêche. On se
servait aussi de petits outils comme la truelle, ou encore une cuillère ou un couteau pour planter les choux et autres légumes. Le seau de bois était le plus courant pour transporter l’eau et arroser les
plates-bandes, alors que l’arrosoir restait rare et réservé aux plus aisés.
L’entretien du Jardin du Gouverneur aujourd’hui
Les méthodes de lutte contre les insectes, les mauvaises herbes et les champignons sont écologiques et respectueuses de notre environnement. Ainsi, aucun pesticide n’est utilisé : ni insecticide, ni herbicide, ni fongicide.
Contre les insectes :
Contre les infections fongiques:
Contre les mauvaises herbes :
Une seule application d’engrais chimique est faite, tôt en début de saison, pour les fleurs ornementales annuelles de la façade et des plates-bandes centrales de l’arrière. Le reste du temps, les engrais utilisés sont : fumure de mouton, compost végétal, enfouissement de paillis, matière végétale mélangée avec des crevettes ou fumure de cheval, vaporisation de purin d’ortie, émulsion d’algues et de poissons. Notons que l’ortie, souvent considérée comme une mauvaise herbe, est en réalité une plante particulièrement précieuse car elle favorise la formation de l’humus et accélère la fermentation des compost et des fumiers. Le purin d’ortie est riche en divers sels minéraux, il se prépare en recouvrant la plante fraîche coupée d’eau puis en laissant fermenter trois semaines. Ce purin enrichit le sol, protège les plantes des maladies et les fortifie.
L’entretien du Jardin du Gouverneur comprend une grande diversité de tâches, effectuées d’avril à novembre par des horticulteurs de la ville de Montréal : nivelage des surfaces, installation des bacs à fleurs, plantation et semis, arrosage, binage et désherbage, épandage de compost, taille de certains arbustes, entretien de la pelouse, vérification de la présence d’insectes pour certains végétaux, récolte, installation des protections hivernales, etc. Voici un aperçu du déroulement de ces activités dans l’année (arrosage mis à part) :
Le jardin potager de la Nouvelle-France est diversifié et sa plantation très créative. Les premiers colons essaient d’acclimater les espèces européennes et ils essaient d’apprivoiser la culture des plantes indigènes. Ce n’est pas toujours facile, car plusieurs d’entre eux sont des soldats devenus cultivateurs par la force des événements. Cette grande aventure débouchera sur l’utilisation d’une multitude d’espèces, dont beaucoup ont aujourd’hui disparu ou se sont hybridées.
Le potager doit assurer la subsistance des habitants pendant l’hiver, l’accent est donc mis sur les légumes qui se conservent bien comme les choux, les carottes, les navets, les pois, les fèves et les oignons. On y retrouve aussi des topinambours et des concombres, qui sont très populaires. Pehr Kalm note que les Canadiens s’en régalent lorsqu’ils sont apprêtés avec de la crème et des fines herbes. Dans les potagers de la noblesse, le raffinement se marque par certaines espèces de légumes comme les artichauts et les asperges. La salade est également très appréciée, on la déguste avec des herbes et des fleurs comestibles (fleurs de ciboulette, de bourrache, de souci, de monarde ou de capucine).
Le jardin potager utilise souvent le compagnonnage, soit une technique de plantation qui met à profit les vertus de certaines plantes pour favoriser la croissance d’autres plantes. Il favorise également la pollinisation. On voit donc des mariages d’espèces différentes en un même endroit : légumes, fleurs, rosiers et plantes aromatiques. Par exemple, l’ail voisine en harmonie avec les roses et les framboises, la bourrache avec les fraises et les courges, le romarin et la sauge aiment les choux et les carottes, et la sarriette, les haricots.
L’oignon rouge est la plante potagère la plus fréquente; viennent ensuite la citrouille, les carottes, la laitue; les paysans plantent également dans leurs jardins des groseilliers rouges; parfois des phaseoli (Phaesolus vulgaris)(haricots) et une assez bonne quantité de concombres. – Pehr Kalm
L’oignon rouge est la plante potagère la plus fréquente; viennent ensuite la citrouille, les carottes, la laitue; les paysans plantent également dans leurs jardins des groseilliers rouges; parfois des phaseoli (Phaesolus vulgaris)(haricots) et une assez bonne quantité de concombres.
– Pehr Kalm
La culture des «trois soeurs»
Ce type de culture était pratiqué par les Autochtones, en lien avec une légende qui faisait du maïs, du haricot et de la courge des plantes sacrées assurant la survie physique et spirituelle de leur peuple. Il s’agit d’un plant de maïs (Zea mays), planté dans une petite butte avec des haricots (Phaseolus vulgaris), qui se servent de la tige du maïs comme tuteur, et des courges (Cucurbita pepo) dont les larges feuillesconservent l’humidité et empêchent les mauvaises herbes de pousser. Les nations iroquoïennes qui étaient enrelation avec les Canadiens de la Nouvelle-France connaissaient une quinzaine de variétés de maïs, une soixante d’espèces de haricots et huit variétés de courges, incluant la citrouille.
À vous de jouer! Plantez votre propre jardin des «trois sœurs.»
Il est facile de planter les «trois sœurs». Commencez à la fin de mai ou au début de juin en faisant des petits monticules de terre dans votre jardin. Chaque monticule doit mesurer approximativement 30 cm de haut et 20 cm de large. Taponnez légèrement chaque monticule pour lui donner un sommet plat.
Plantez 6 graines de maïs en cercle sur chaque monticule.
Attendez une semaine ou deux pour que le maïs atteigne une hauteur d’une douzaine de centimètres. Plantez alors 6 graines de haricot en cercle, à 15 cm du maïs.
Attendez une autre semaine et plantez 6 graines de courge (citrouille par exemple) autour de la base de chaque monticule.
Lorsque toutes les plantes poussent bien, vous devez enlever les plantes les plus faibles et ne laisser que les plus fortes. Faites cela pour le maïs, les haricots et les courges. Assurez-vous que les haricots poussent le long des tiges de maïs, qui leur servent de tuteur. Les courges poussent autour de chaque monticule.
Le chou est certainement le doyen de nos légumes, puisqu’il est présent en Europe à l’époque préhistorique. Les gastronomes romains se querellent à son sujet, certains le trouvant fin, les autres vulgaire. Il est très populaire au Moyen-Âge, car en plus de ses vertus culinaires, il est utilisé en cataplasme pour traiter sciatiques et ulcères variqueux. Il restera longtemps le médecin du pauvre. Pas étonnant qu’il soit un des premiers légumes plantés par les habitants de Nouvelle-France. Il a donné plus de cent variétés.
Également classée parmi les légumes-fruits avec le melon et la pastèque, elle était cultivée en Amérique du Nord depuis très longtemps. Elle est introduite en Europe après la conquête et elle est cultivée aujourd’hui sur tous les continents. Elle figurait parmi l’alimentation de base des Autochtones, avec les haricots et le maïs. Ils la faisaient sécher en tranche au soleil et la mangeaient ainsi pendant les mois d’hiver.
Le haricot était commun dans toute l’Amérique, du Pérou à la vallée du Saint-Laurent. On a retrouvé ses traces dans des sites archéologiques datant de 12 000 ans. Il est certainement une des plus anciennes plantes cultivées du continent américain. Ramené de Cuba par Christophe Colomb, il se répandra dans toute l’Europe pour donner des centaines de variétés.
Les médecins chinois la recommandaient déjà il y a 5000 ans. Elle a trouvé son chemin jusqu’en Europe en passant par la Sibérie. On trouvait de la rhubarbe dans le potager du Roi. Elle s’est bien adaptée au Québec. Les Chinois utilisaient son rhizome, mais nous consommons aujourd’hui ses tiges qui servent à de délicieuses compotes ou confitures.
Également appelée «artichaut de Jérusalem». L’origine de cette plante est incertaine : certains la disent originaire d’Amérique du Nord, d’autres affirment qu’elle doit son nom à une tribu indienne du Brésil, les Topinambas. Cultivée sous le Régime français pour ses tubercules, elle a été détrônée plus tard par la pomme de terre.
En 1749, Pehr Kalm décrit longuement les cultures et les potagers des habitants de la Nouvelle-France, mais il ne fait aucune référence aux plantes ornementales qui y figurent. Pourtant, quarante ans plus tard, Thomas Anbury, qui publie lui aussi un journal de voyage, mentionne : «Le goût des fleurs parmi toutes les classes de la société canadienne française est presque généralisé.»
Dans le Jardin du Gouverneur, les fleurs propres au XVIIIe siècle sont concentrées dans le jardin ornemental, mais on les retrouve aussi dispersées dans les autres carrés ou le long des murs. Par ailleurs, les parterres donnant sur la rue Notre-Dame, créés au XIXe siècle lors de l’ouverture du Musée, contiennent des plantes de cette époque. On y retrouve encore des pivoines, hémérocalles, lys et hortensias voisinant avec des hostas et des astilbes.
Elle était cultivée en Nouvelle-France surtout pour ses propriétés médicinales. En effet, l’achillée est connue depuis des millénaires pour guérir les plaies, les ulcères et les hémorroïdes saignantes. Elle doit son nom au héros de la mythologie grecque, Achille, qui s’en servit pour guérir les blessures du roi Téléphe. En Amérique du Nord, la plupart des groupes autochtones l’employaient. Ils l’appelaient «queue d’écureuil», à cause de la forme de ses feuilles. Son huile essentielle a une action anti-inflammatoire. En usage externe, on emploie l’infusion sous forme de compresses dans le traitement des plaies.
Appelé Dianthus, fleur divine, par le philosophe et botaniste grec Théophraste, il est cultivé depuis plus de 2000 ans pour son odeur et sa beauté. Dans la Rome ancienne, il était connu comme la fleur de Jupiter. En Chine, il était utilisé pour ses vertus médicinales et mentionné dans les anciens herbiers chinois pour le traitement des infections des voies urinaires. Il était très populaire en France au XVIIe siècle. Sa culture passionnait autant les nobles que les paysans. Cet intérêt a persisté jusqu’au début du XXe siècle.
L’hémérocalle fauve est originaire du nord-est de l’Asie. Elle a été amenée d’Europe à titre de plante ornementale et s’est naturalisée en Amérique du Nord. Ses fleurs ne durent qu’une journée et ne produisent aucune graine. Elle se multiplie de façon végétative à partir de fragments qui s’enracinent.
L’iris est cultivé depuis la nuit des temps. On le retrouve sur les murales des temples d’Egypte, il y a près de 4000 ans. Au Moyen Âge, il est utilisé pour ses vertus médicinales, et odorantes dans le cas de certaines espèces dont les racines broyées sentaient la violette. L’iris, qui a la couleur du ciel, est la fleur de Florence et de la Toscane. En France, en 1147, Louis VII adopte l’iris jaune comme emblème de la France. L’iris s’est répandu dans tout l’hémisphère Nord et comprend de très nombreuses espèces, aussi bien vivaces que bulbeuses. C’est à cette dernière catégorie qu’appartient l’iris versicolore qui pousse à l’état naturel dans toutes les régions du Québec… et qui en est la fleur emblématique.
De la même famille que les topinambours, cette fleur est originaire d’Amérique centrale, où elle était déjà cultivée, il y plus de 3000 ans. Elle peut s’élever jusqu’à trois mètres de hauteur et sa fleur peut atteindre jusqu’à 80 cm de diamètre. Le tournesol doit son nom à la faculté qu’il a de suivre le soleil dans sa course. Les Iroquoiens le cultivaient pour ses graines. En Europe, le tournesol fut d’abord considéré comme une curiosité, puis comme une friandise. C’est au 19e siècle que sa culture est réalisée à grande échelle. Au Québec, il est cultivé très tôt.
Les fruits sont très appréciés en Nouvelle-France. Les arbres fruitiers les plus populaires sont acclimatés et protégés de paille l’hiver. La technique de taille des arbres en espalier, qui était très répandue en Europe, se pratique aussi au Canada. Les petits fruits, cultivés ou sauvages, sont également très populaires. Ils sont cueillis en abondance, puis séchés ou transformés en confiture.
Pehr Kalm (élève de Linné, ce célèbre botaniste suédois fit un périple au Canada en 1749 et nota ses observations sur les jardins qu’il y vit) note :
Les arbres fruitiers se plaisent fort bien dans la région de Montréal. Les principaux fruits que j’ai vus ici sont différentes espèces de pommes et de poires, toutes fort belles. Il faut noter que, si les pommes peuvent fort bien pousser très vite au Québec, les poires, elles, ne s’y acclimatent pas. Ici, les pêchers ne poussent ni volontiers, ni bien. Il est des arbres cependant qui s’aguerrissent un peu, mais il est nécessaire de les envelopper de paille chaque hiver. J’ai mentionné précédemment les vignes importées de France. On a fait venir de là également différentes espèces de pruniers; ils s’acclimatent bien ici et n’exigent pas de soins l’hiver.
Plantés contre des clôtures, les arbres en espalier étaient protégés du vent et bénéficiaient d’un microclimat. Si on compare les variétés anciennes cultivées en espalier, citées par exemple par la Quintinie (1624-1691, créateur du potager du Roi Louis XIV), avec celles d’aujourd’hui, on s’aperçoit qu’elles ont disparues. Devenues fragiles, elles ont été remplacées par de nouvelles variétés.
Le but principal de la taille est de conserver les plantes en bonne santé en les débarrassant des branches mortes, endommagées ou malades. La taille a aussi pour but de former une plante pendant sa croissance, en la rendant plus petite ou plus touffue selon l'usage auquel on la destine. Chez les arbres fruitiers la taille sert à amener la plante à avoir une bonne production. Il existe différents types de tailles : la taille de limitation de développement lorsqu'une plante devient envahissante, la taille de rajeunissement pour supprimer le vieux bois, la taille sculpturale pour produire des topiaires, des espaliers ou des plantes naines.
La taille en espalier est une taille de formation : elle a pour but de former une plante durant sa croissance, en choisissant la forme qu'aura la plante à maturité et en guidant la formation de la charpente et des branches principales. La forme en espalier consiste à planter un arbre au pied d'un mur et à l'y dresser suivant la direction qu'on veut lui faire prendre. C'est donc une façon de cultiver un arbre en deux dimensions seulement et l'arbre adossé au mur donne l'allure d'une plante grimpante. Les pommiers, les poiriers et les vignes sont très populaires pour ce type de taille.
Il est, selon un vieil adage, un élixir de vie qui entretient la santé et fait que les personnes âgées paraissent plus jeunes qu’elles ne sont. Il doit son nom à la région de Cassis où il était cultivé au XVIe siècle. Ses fruits s’emploient dans la fabrication de gelées, confitures, sirops et vin. Son infusion est recommandée aux rhumatisants, aux goutteux et pour tous les troubles liés au mauvais fonctionnement des reins et de la vessie.
Il est três populaire en Nouvelle-France et éclipsera le cassis. Pehr Kalm note sa présence dans les jardins potagers, aussi bien à Montréal qu'à Québec. Ses cultivars donneront naissance aux gadeliers, de culture encore plus facile.
Le poirier serait originaire d'Asie Mineure. Inconnues en Égypte et en Syrie, les poires étaient appréciées en Grèce, où elles furent introduites par le nord des Balkans. Pline mentionne déjà une quarantaine d'espèces. Les Romains la font connaître en Europe. Au XVIIe siècle, comme pour les pommes, on distingue les poires à couteau (fruits de dessert), les poires à cuire et les poires à cidre. Le poirier est l'arbre fruitier des régions tempérées mais certaines espèces ont pu résister à nos hivers, dans la région de Montréal principalement. Il se taille bien en espalier et les murets le protègent des gelées printanières, ce qu'il redoute le plus.
De culture facile, le pommier était déjà connu au temps de la préhistoire. Originaire d'Asie centrale, la pomme est connue en Égypte, en Grèce et à Rome qui en dénombre 32 variétés. Très populaire au Moyen Âge, elle figure-également en bonne place dans les vergers de Louis XIV où la Quintinie (1624-1691, créateur du potager du Roi Louis XIV) cultivait au moins huit variétés. Les premiers arrivants introduisent en Nouvelle-France des plants originaires de Normandie. Ils se sont acclimatés assez facilement. Aujourd'hui, dans le monde, il y a plus de 7000 variétés.
Le marquage des pommes, technique d’ornement inventée pour magnifier les fruits Le roi Louis XIV, Roi Soleil dans son château de Versailles, ne voulait consommer que des aliments qui sortaient de l’ordinaire et se démarquaient de ceux du commun des mortels. Pour qu’il accepte de manger des fruits, nécessaires à sa santé, on utilisait donc la technique du marquage des pommes (poires également). Les plus beaux fruits sont sélectionnés et ensachés au début de l’été. A la fin de l’été on y applique un cache, sorte de pochoir à l’effigie du roi. Au début de l’automne les caches sont décollés et les fruits devenus mûrs sont ainsi décorés d’un portrait du souverain, qui apparaît en vert et les distingue de tout fruit ordinaire. Mais l’origine de la technique de marquage des fruits remonte bien au-delà de l’époque du Roi Soleil. En effet, dans «Le livre de l'agriculture», l'agronome arabo-andalou Ibn Al'Awwam fait mention de cette invention qui ouvre la voie à l'expérimentation de techniques de cultures. Le marquage des pommes était aussi très en vogue au XIXe siècle et au début du XXe siècle, comme en témoignent les expositions universelles de fruits marqués qui se déroulèrent alors. A l’époque, cette technique permit aux producteurs de fruits de luxe de Montreuil (près de Paris) de faire face à la vive concurrence des producteurs d'outre-atlantique. Aujourd'hui, c'est en Asie que les fruits marqués semblent gagner leurs titres de noblesse en tant que présents chargés de symbole, objets de décoration voire même d'offrandes aux dieux.
Le marquage des pommes, technique d’ornement inventée pour magnifier les fruits Le roi Louis XIV, Roi Soleil dans son château de Versailles, ne voulait consommer que des aliments qui sortaient de l’ordinaire et se démarquaient de ceux du commun des mortels. Pour qu’il accepte de manger des fruits, nécessaires à sa santé, on utilisait donc la technique du marquage des pommes (poires également). Les plus beaux fruits sont sélectionnés et ensachés au début de l’été. A la fin de l’été on y applique un cache, sorte de pochoir à l’effigie du roi. Au début de l’automne les caches sont décollés et les fruits devenus mûrs sont ainsi décorés d’un portrait du souverain, qui apparaît en vert et les distingue de tout fruit ordinaire.
Mais l’origine de la technique de marquage des fruits remonte bien au-delà de l’époque du Roi Soleil. En effet, dans «Le livre de l'agriculture», l'agronome arabo-andalou Ibn Al'Awwam fait mention de cette invention qui ouvre la voie à l'expérimentation de techniques de cultures. Le marquage des pommes était aussi très en vogue au XIXe siècle et au début du XXe siècle, comme en témoignent les expositions universelles de fruits marqués qui se déroulèrent alors. A l’époque, cette technique permit aux producteurs de fruits de luxe de Montreuil (près de Paris) de faire face à la vive concurrence des producteurs d'outre-atlantique. Aujourd'hui, c'est en Asie que les fruits marqués semblent gagner leurs titres de noblesse en tant que présents chargés de symbole, objets de décoration voire même d'offrandes aux dieux.
La vigne est présente en Égypte dès la fin de l'ère tertiaire. Les références à la vigne abondent dans l'Évangile. Son nom provient de l'ancien latin et dérive du verbe «vicere», attacher, allusion aux vrilles de la plante. Dans la Grèce antique, où l'on vénérait Dyonisos, la vigne –et le vin– étaient un symbole de civilisation. Sa culture fut introduite en Gaule par les Romains. Sur l'Île d'Orléans, Jacques Cartier note la présence de vignes sauvages (vitis riparia) chargées de raisins dès sa première visite, mais «ne sont lesdits raisins ni doux, ni gros comme les nôtres.» Il la baptise quand même, Île de Bacchus. La sève de la vigne était utilisée en France au XVe siècle sur les plaies cutanées et comme collyre.
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, le jardin d’herbes est avant tout utilitaire et on le retrouve chez tous ceux qui ont un jardin, nobles ou roturiers. Chez ces derniers, l’organisation était toutefois beaucoup moins symétrique et tout était semé par tas et en abondance.
Ces herbes sont indispensables à la vie de tous les jours : elles donnent du goût aux aliments, elles parfument gens et maisons, elles soignent mieux que les médecins de l’époque, certaines sont même utilisées pour faire des potions à chasser les démons. Les plantes sont polyvalentes et leurs vertus ne se catégorisent pas de façon rigide. La ciboulette par exemple est utilisée en cuisine, mais ses fleurs sont intégrées dans des bouquets et ses feuilles servent à des préparations médicinales. Le rosier des apothicaires est utilisé pour ses vertus médicinales et l’achillée qui attire les abeilles sert aussi dans les bouquets, en cuisine ou en infusion.
Les herbes aromatiques et médicinales sont plantées le long des murs, près des maisons, au milieu ou en pourtour des plates-bandes. Leur capacité à éloigner les insectes nuisibles est largement utilisée. Elles sont aussi des compagnes de choix de certains légumes ou de fleurs. L’ail voisine en harmonie avec les roses et les framboises, la bourrache avec les fraises et les courges, le romarin et la sauge aiment les choux et les carottes, et la sarriette, les haricots.
Quelques exemples d’utilisation de fines herbes : Tomate à la vinaigrette : assaisonne la farce, le bœuf braisé et les pains de bœuf. Élément essentiel de la sauce aux fines herbes. Thym : assaisonnement délicat des sauces aux fines herbes, fromages, pains de viande, pâté de foie, farces pour veau et mollusque. Élément essentiel du bouquet garni. Basilic : le basilic peut remplacer le thym comme condiment. On l’ajoutera avec profit aux potages, salades, crudités qu’il aseptise. On connaît, par ailleurs, le canard au basilic et la soupe au pistou, l’une des plus renommées de la Provence.
Quelques exemples d’utilisation de fines herbes :
Tomate à la vinaigrette : assaisonne la farce, le bœuf braisé et les pains de bœuf. Élément essentiel de la sauce aux fines herbes.
Thym : assaisonnement délicat des sauces aux fines herbes, fromages, pains de viande, pâté de foie, farces pour veau et mollusque. Élément essentiel du bouquet garni.
Basilic : le basilic peut remplacer le thym comme condiment. On l’ajoutera avec profit aux potages, salades, crudités qu’il aseptise. On connaît, par ailleurs, le canard au basilic et la soupe au pistou, l’une des plus renommées de la Provence.
LES HERBES AROMATIQUES Longtemps éclipsées par les épices, les fines herbes font un retour en force au XVIIe siècle alors que la gastronomie française moderne se développe grâce aux premiers grands chefs cuisiniers. Mais c’est au XVIIIe siècle que l’invention culinaire, qui s’exerce lors des fêtes et soupers fins organisés par le Roi ou par la noblesse, atteint des sommets qui ne seront jamais égalés. Les premiers grands livres de cuisine sont d’ailleurs publiés à cette époque.
Les fines herbes servent à apprêter les plats, les farces ou le pousset, un sel d’herbes qui aromatise les potages. Mais elles ont plus que des vertus condimentaires, elles sont souvent utilisées pour leur odeur et surtout pour leurs vertus médicinales. Que ce soit l’ail, la menthe, la bourrache, l’oignon, la livèche ou l’hysope, leurs propriétés curatives sont autant appréciées que leur goût.
LES PLANTES ODORANTES Au XVIIe siècle, les plantes odorantes sont très populaires. La propreté étant très relative, les essences de lavande ou de romarin permettent de masquer les odeurs. L’eau de rose et l’eau de violette sont également très appréciées. Dans la maison, les coussins d’herbes parfument les armoires et chassent les insectes.
LES HERBES MÉDICINALES Les vertus médicinales des herbes sont utilisées depuis la nuit des temps. On retrouve leur trace dans les fouilles archéologiques, dans la tradition orale et dans les livres. Pendant des millénaires elles ont permis à l’homme de se guérir. Encore aujourd’hui, elles sont à la base de nombreux médicaments. Le traitement par les plantes se fait par décoctions, infusions, macérations. On obtient ainsi des potions, tisanes, élixirs, vins médicinaux, sirops, poudres, pilules, cataplasmes, emplâtres, onguents et liniments
Une séparation des tâches Dans les jardins d’herbes, c’est la femme qui veillait au soin des plantes et à la récolte, tandis que le mari s’occupait du bêchage, de la taille et du palissage.
Une séparation des tâches
Dans les jardins d’herbes, c’est la femme qui veillait au soin des plantes et à la récolte, tandis que le mari s’occupait du bêchage, de la taille et du palissage.
Les sauvagesses et les françoises mal-intentionnées croient que le sang-dragon a la vertu de pousser puissamment les mois et qu’il pouvoit causer l’avortement. –Jean-François Gauthier
Les sauvagesses et les françoises mal-intentionnées croient que le sang-dragon a la vertu de pousser puissamment les mois et qu’il pouvoit causer l’avortement.
–Jean-François Gauthier
La médecine du XVIIIe siècle établit un rapport entre le mal et le remède. Alors que les remèdes généraux agissent sur l’équilibre entre les quatre humeurs (bile, atrabile, flegme et sang), les remèdes spécifiques sont indiqués conformément à la théorie des signatures (correspondances). Ainsi, la forme et la couleur d’une feuille, d’une fleur ou d’une racine permettent de déceler des affinités avec l’organe et la maladie. Par exemple, le sang-dragon sert à provoquer les règles.
C'est une des plantes les plus utilisées en cuisine et en médecine. Originaire d'Asie Centrale, elle sert déjà d'aliment, selon Hérodote, aux Égyptiens qui travaillent à la construction de la grande pyramide de Gizeh. Ils lui prêtent des pouvoirs magiques et médicaux. Elle entre en France au moment des Croisades et arrive en Amérique avec les premiers colons. L'ail est resté le remède universel dans les campagnes.
Son nom serait d'origine grecque, de «basilikon» qui signifie royal. De nombreuses légendes sont reliées au basilic, qui était considéré comme une plante sacrée. La cueillette du basilic s'accompagnait de rituels précis, précédés d'une purification. Chez les Égyptiens, il servait avec la myrrhe, l'encens, la sauge et le thym à l'embaumement des morts et, à Rome, il était l'emblème des amoureux. Pline l'indique contre l'épilepsie; il est également recommandé en cas de migraines d'origine digestive. Le basilic ne doit jamais être mijoté car son essence est très volatile. Il doit être ajouté aux plats en fin de cuisson. Il est le compagnon idéal des tomates et des asperges.
Le basilic peut remplacer le thym comme condiment. On l'ajoutera avec profit aux potages, salades, crudités qu'il aseptise. On connaît, par ailleurs, le canard au basilic et la soupe au pistou, l'une des plus renommées de la Provence.
Elle est répandue dans toutes les régions tempérées, depuis la nuit des temps. Les Egyptiens la vénéraient et la dédiaient au dieu du Soleil pour ses vertus. Les Romains l'appelaient «la plante du docteur» et l'ont introduite en Europe. Elle pousse sur tous les terrains, même dans les décombres. Il existe plusieurs espèces, dont la grande camomille (chrysanthemum parthenium) et la petite camomille (anthemis nobilis). Elle est efficace en cas de troubles digestifs, de tension nerveuse et d'irritabilité. On s'en sert aussi pour soigner les plaies, les démangeaisons et les yeux irrités. L'espèce Chamomilla matricaria doit son nom à ses vertus régénérantes pour la matrice.
L’infusion de camomille était jadis utilisée, après shampoing, comme eau de rinçage pour éviter la chute des cheveux. De nos jours, on ne l’emploie plus guère que pour blondir, on n’a donc retenu que cette action secondaire.
Déjà connue des Chinois, il y a près de 2000 ans, elle était appréciée pour son goût comme pour ses vertus médicinales. Les Égyptiens l'utilisaient abondamment. Au Moyen Âge, la ciboulette se vendait à la criée sous le nom d'appétits. Sa valeur alimentaire est comparable à celle de l'oignon. Les Autochtones l'utilisaient pour soigner les rhumes et les piqûres.
Les Hébreux l'appelaient Ezôb. C'était une plante sacrée et, à ce titre, elle est maintes fois citée dans la Bible. Hippocrate la prescrivait pour soigner la bronchite et la pleurésie. Au Moyen-Âge, elle est très employée en cuisine et agrémente soupes, farces et rôties. Selon un dicton «quiconque rivalise avec les vertus de l'hysope en sait trop». Elle est utilisée dans la préparation de liqueurs médicinales comme la Chartreuse. Son odeur éloigne les insectes nuisibles dans les plates-bandes.
Goûtez la Nouvelle-France: essayez ces recettes.